Comprendre le management avec La casa de papel

Mathias Szpirglas

À première vue un braquage exceptionnel et un cours de management n’ont rien en commun… Et pourtant ! Sortie en 2017, la série télévisée La casa de papel propose en filigrane une véritable leçon en la matière. C’est du moins l’avis de Mathias Szpirglas, maître de conférences à l’IAE Paris-Est, Université Gustave Eiffel, qui consacre un ouvrage au sujet.

Paru en mars 2023 aux éditions EMS, Comprendre le management avec La casa de papel est le premier ouvrage de Mathias Szpirglas, maître de conférences en sciences de gestion à l’IAE Paris-Est de l’Université Gustave Eiffel. Mettant à profit le confinement pour visionner La casa de papel, l’enseignant-chercheur remarque d’emblée que l’organisation du braquage au cœur de la série illustre la plupart des grands principes et notions du management. Il partage son point de vue sur Twitter avant d’être approché par la maison d’édition EMS (spécialisée dans la publication d’ouvrages universitaires dans les domaines de la gestion et du management) pour la rédaction d’un livre illustré sur le sujet. En attendant la sortie de l’ouvrage, le 2 mars dernier, il a diffusé une série de de courtes vidéos sur YouTube afin de donner un avant-goût à ses futurs lecteurs. 

Les fondamentaux du management à travers le prisme de la fiction

La première saison de la série espagnole à succès nous fait vivre le braquage de la Fabrique nationale de la monnaie et du timbre de l’intérieur, au plus près de ses protagonistes. L’organisation du braquage décrite par le personnage de Tokyo fait étonnement écho aux préceptes d’Henry Mintzberg, professeur de management à l'Université McGill de Montréal. On retrouve en effet les différents éléments qui structurent selon lui une organisation : le centre opérationnel, le sommet stratégique, la ligne hiérarchique, la technostructure, la fonction de support logistique et enfin une idéologie partagée par les acteurs.

Autre doctrine de management représentée dans La casa de papel, celle du PODC d’Henri Fayol. Formulée en 1916 dans son ouvrage L'Administration industrielle et générale, cette théorie est fondée sur quatre grands principes (planifier, organiser, diriger et contrôler) est exposée dans le casse racontée dans la série. La coordination du travail est elle aussi conforme à ce que l’on retrouve dans des organisations plus classiques, légales. Chaque braqueur est ainsi rigoureusement sélectionné pour ses qualifications spécifiques et la coordination du travail va être réalisée par standardisation des qualifications. Le Professeur va à la fois coordonner l’activité de sa petite équipe par supervision directe, ajustement mutuel, standardisation des procédés et des résultats.

Une organisation qui fait écho à la crise sanitaire

Autre point relevé par Mathias Szpirglas, la gestion à distance du Professeur qui n’est pas sans rappeler les bouleversements de la crise du COVID. Le Professeur gère en effet ses équipes depuis un hangar. Ce poste décentralisé lui permet de piloter ses coéquipiers à distance en déléguant le pilotage et le contrôle des opérations à son second, le personnage de Berlin. Par ailleurs, il met en place une ligne directe et un système de reporting fixé toutes les six heures. La série montre bien tout ce que le management à distance comporte comme avantages (liberté d’action, autonomie de prise de décision…) mais aussi comme risques : le personnage de la narratrice, Tokyo, joue en effet le rôle d’élément perturbateur et manque à plusieurs reprises de compromettre l’organisation du braquage.

L'interview a été réalisée par l'agence Kogito.