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Une analyse locale et collective de l’eau et de ses usages
Regards croisés
Entretien avec Tiphaine Hinault, directrice du CPIE Logne et Grand-Lieu et Mathieu Goriaux, Ingénieur de recherche au Laboratoire Eau et Environnement (LEE) de l’Université Gustave Eiffel.
Quels sont les grands enjeux actuels autour de la question des ressources en eau ?
Mathieu Goriaux : Les deux grands enjeux sont la disponibilité et la qualité de l’eau. À cause du réchauffement climatique et des longues périodes de sécheresse, les restrictions d’eau décidées par décrets préfectoraux arrivent plus précocement dans la saison. Machecoul-Saint-Même n’est pas épargnée par ce phénomène. L’autre problématique à laquelle les communes doivent faire face est celle de la pollution et des nombreux contaminants dans l’eau : produits phytosanitaires, pesticides, métaux, substances per- et polyfluoroalkylées (PFAS/PFOA), etc.
Tiphaine Hinault : Au CPIE nous nous intéressons également au stockage et aux usages de l’eau de réseau, de puits ou de pluie. L’étude d’une ville comme Machecoul-Saint-Même, qui se trouve en bordure d’une activité agricole importante, est très intéressante car nous n’avons pas suffisamment de donnés sur ce genre de territoire.
M.G. : La littérature scientifique se concentre en effet sur les zones métropolitaines ou rurales. Notre étude apporte un éclairage inédit en ce qu’elle s’intéresse à une zone intermédiaire, peu étudiée jusqu’à présent.
Apporter un éclairage inédit sur la qualité de l’eau des petites villes.
Quels enseignements tirez-vous de cette étude ?
M. G. : Au sujet de la gestion et du stockage de l’eau, nous avons repéré une contamination au plomb chez un particulier qui était due à une rénovation de toiture. Il faudrait sensibiliser les usagers sur l’entretien de leur récupérateur d’eau de pluie (notamment en réalisant une vidange annuelle) et rappeler les risques de contamination de l’eau en cas de travaux. En termes de recommandations à destination des fabricants, il faudrait faciliter l’installation et la désinstallation des récupérateurs ainsi qu’améliorer la fermeture du système de collecte.
Un autre point intéressant concerne les valeurs des composants mesurés : il ressort que les eaux de puits sont globalement de meilleure qualité. Les composés tels que le glyphosate, le sulfosate, le métolachlore ou le propyzamide ont tous été détectés dans les eaux de pluie.
T. H. : Cette étude a permis d’observer, du moins à l’échelle de la commune, qu’il n’y a aucune corrélation entre un taux de pesticide élevé et une zone de maraîchage. S’il faut garder à l’esprit que l’analyse ne concerne que quelques zones de prélèvements, ce fait est assez notable pour être souligné. Le raccourci qui voudrait attribuer la responsabilité de la pollution par pesticide à la seule activité maraichère est ici remis en question. Autre élément mis en lumière par l’expérimentation : l’usage des eaux n’est pas toujours celui attendu. Si classiquement les eaux de puits sont utilisées au jardin, certains habitants s’en servent également pour la cuisine et les sanitaires.
Comment envisagez-vous de diffuser ces résultats auprès du grand public ?
M.G. : Le temps nous a manqué sur cette expérimentation. Nous avons déposé un projet auprès de l’ARS dans l’espoir de poursuivre l’expérimentation, en particulier sur les aspects de sensibilisation avec la tenue de conférences grand public et la distribution de supports pédagogiques sur le sujet de la qualité de l’eau.
En savoir plus sur les porteurs de projets
Tiphaine Hinault
Actuelle directrice du CPIE Logne et Grand-Lieu, en charge des projets Eau et Environnement, Tiphaine a rejoint le centre en 2011 où elle a d’abord été chargée de mission Environnement et Paysages avant d’en prendre la direction.
Mathieu Goriaux
Ingénieur de recherche au Laboratoire Eau et Environnement (LEE) du Département Géotechnique, environnement, risques naturels et sciences de la Terre (GERS) de l’Université Gustave Eiffel, Mathieu consacre ses activités de recherche aux polluants dans l’environnement. Il s’intéresse en particulier aux transferts de ces polluants entre les compartiments atmosphère, sol, eau (dépôt, retombées, remise en suspension) ainsi qu’aux différentes stratégies et méthodologies de mesures des particules et des polluants particulaires.